Berliner Tageblatt - En Colombie, une réforme des retraites en faveur des personnes âgées sans ressources

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En Colombie, une réforme des retraites en faveur des personnes âgées sans ressources
En Colombie, une réforme des retraites en faveur des personnes âgées sans ressources / Photo: © AFP

En Colombie, une réforme des retraites en faveur des personnes âgées sans ressources

Enfant, elle gardait les vaches. Puis elle a travaillé des années comme femme de ménage non déclarée. A 68 ans, Miriam Calderon doit aujourd'hui trier les poubelles à Bogota comme recycleuse informelle pour continuer à survivre.

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Avec l'adoption d'une nouvelle réforme des retraites en Colombie, Miriam, qui fait partie des 2,6 millions de personnes âgées sans droit à la retraite selon le ministère du Travail, va désormais toucher 55 dollars, soit 25 de plus chaque mois.

Une augmentation modeste et un revenu encore loin du salaire minimum (250 dollars), mais qui place les personnes âgées sans droit à la retraite au-dessus du seuil d'extrême pauvreté en Colombie. Avec l'un des taux de travail informel les plus élevés d'Amérique latine (56%), l'extrême pauvreté touche 37% de la population.

Les cartons, bouteilles, canettes et récipients en verre attachés à un chariot métallique aux roues branlantes récupérés dans les rues de Las Cruces, l'un des quartiers les plus anciens mais aussi les plus malfamés de la capitale, permettront à Miriam Calderon de payer le loyer de la maison qu'elle partage avec son mari malade, Francisco, âgé de 85 ans.

Son salaire: trois à quatre dollars par jour. Fatiguée, elle avoue avoir été confrontée à un terrible dilemme il y a quelques semaines: "Payer le loyer ou nous acheter à manger", confie-t-elle à l'AFP.

Cette augmentation mensuelle de 30 à 55 dollars est la première réforme sociale d'envergure obtenue mi-juillet au Parlement par Gustavo Petro, premier président de gauche de l'histoire de la Colombie: "Un premier grand changement historique et en faveur du peuple", selon lui.

- "Une bénédiction" -

Francisco, ex-maçon aujourd'hui handicapé par une thrombose, a été l'un des premiers à en bénéficier. "J'ai cru que j'allais pleurer (...) cette augmentation est une bénédiction", confie sa femme Miriam.

Dans un an, l'allocation sera étendue aux femmes de plus de 57 ans et aux hommes de plus de 62 ans. A moins que l'opposition de droite ne parvienne à faire annuler la loi par la Cour constitutionnelle. "Pourquoi vont-ils nous refuser ce pour quoi nous avons travaillé (...). A mon âge, je ne devrais pas avoir à ramasser les ordures", s'énerve Mme Calderon.

Deyanira Cruz, 65 ans, une femme souriante aux cheveux courts n'a, comme Miriam, eu que très peu de répit dans une vie de labeur.

"J'ai commencé à travailler à dix ans, je devais m'occuper des deux petits enfants" de ses employeurs, se souvient-elle dans le salon du coquet appartement de Soacha, près de Bogota, qu'elle partage avec sa fille, qui l'aide financièrement, et une petite-fille.

Modeste, mais lumineux et soigné, son logis ressemblerait presque aux "maisons de riches" dans lesquelles elle a travaillé la majeure partie de sa vie, sans contrat de travail et en recevant parfois moins que le salaire minimum, explique Deyanira.

"Beaucoup de mes collègues employées de maisons n'étaient pas payées, mais seulement nourries et logées. Moi j'ai eu la chance de trouver de bonnes familles", raconte la femme, qui a reçu en cadeau de ses employeurs une partie des meubles de son salon.

Deyanira a également tenu un petit stand de nourriture dans la rue et a été livreuse pour un magasin de matériaux de construction. Tout cela en élevant seule ses deux enfants. Il fallait "travailler pratiquement 18 ou 19 heures (par jour) pour m'en sortir".

- "Confiscation de l'épargne" -

"Il faut encore se battre coûte que coûte. Si j'ai l'occasion de travailler de temps en temps, j'y vais", explique Deyanira, qui bénéficiera de la réforme à partir de 2025. Mais "25 euros de plus (par mois), c'est important. Je pourrai me dire +pas d'obligation de travailler aujourd'hui+'", s'enthousiasme-t-elle.

Dans le système colombien actuel des retraites, la plupart des salariés cotisent sur des comptes individuels gérés par des fonds privés. La réforme, qui entrera pleinement en vigueur dans un an, oblige, au-delà d'un revenu mensuel de plus de 500 dollars, à cotiser au fonds public de retraite prévu par la nouvelle loi.

Les experts s'accordent à dire que pour pérenniser la réforme, il sera nécessaire de relever l'âge de la retraite, qui est de 62 ans pour les hommes. Plusieurs parlementaires de l'opposition ont attaqué le projet de loi, alléguant de lacunes légales dans son processus d'adoption.

Sur le fond, les détracteurs de la nouvelle loi affirment que les cotisations obligatoires constituent une "confiscation de l'épargne" des Colombiens.

S.Keller--BTB