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Volkswagen face à la fronde de ses salariés inquiets pour l'avenir
Sifflets, fumigènes et faux barils de dynamite brandis par les salariés de Volkswagen en colère ont donné le ton des discussions qui ont démarré mercredi sur l'avenir du premier constructeur européen menacé par des fermetures d'usines, du jamais-vu en Allemagne.
Plus de 3.000 manifestants venus de différentes usines du pays, selon le puissant syndicat IG Metall, ont bruyamment dénoncé les projets du premier groupe automobile européen qui prépare une cure d'austérité inédite. Les mesures d'économies vont être âprement négociées avec les représentants des salaries au cours des prochaines semaines.
Ces menaces sont une "catastrophe" et une "rupture de confiance", explique Diana Hein, responsable syndicale à l'AFP. Cette ouvrière au pré-assemblage à l'usine de Wolfsburg (nord), le fief de Volkswagen, craint que des fermetures d'usines n'entrainent un "effet domino" dans toute l'Allemagne.
Le géant automobile a provoqué une onde de choc début septembre en annonçant son projet de fermer des usines en Allemagne et de procéder à de possibles licenciements, abrogeant dans la foulée l'accord sur la garantie de l'emploi en vigueur depuis trente ans pour les salariés allemands.
Les représentants des salariés, qui disposent d'un pouvoir de co-décision sur la stratégie de l'entreprise, se sont engagés à combattre ces plans, menaçant de grèves qui pourraient paralyser le plus gros employeur industriel d'Allemagne.
- Racines attaquées -
Volkswagen "laisse les problèmes se résoudre sur le dos des travailleurs. Les fermetures d'usine n'ont rien à faire dans la boîte à outils (...) Tous les sites doivent rester !", a lancé Thorsten Gröger, négociateur pour IG Metall, le principal syndicat de l'industrie allemande.
"Nous assistons aujourd'hui à une nouvelle attaque contre nos racines", a dénoncé Daniela Cavallo à la tête de l'influent comité d'entreprise de Volkswagen, partie prenante des négociations.
"On ne résout pas (les problèmes, ndlr) en brandissant la menace de fermetures d'usines, en jetant aux orties notre garantie d'emploi vieille de 30 ans et en effrayant le personnel avec des gros titres sur des licenciements massifs", s'est-elle indignée en s'adressant aux manifestants.
De son côté, le patron de Volkswagen, Oliver Blume, à la tête du groupe depuis 2023, martèle que les coûts de production en Allemagne sont trop élevés alors que les ventes patinent et que les fabricants chinois exercent une concurrence accrue sur le marché crucial des véhicules électriques.
Jan Sören-Lühr, 37 ans, ouvrier à Wolfsburg, blâme la direction du groupe, "dont le seul concept pour préparer l'avenir est de faire des économies". Volkswagen devrait se concentrer sur sa stratégie industrielle et accélérer le lancement de modèles électriques "abordables", selon lui.
Le groupe a bien promis un modèle électrique autour de 20.000 euros, pour relancer des ventes en chute libre, mais il ne sera pas commercialisé avant 2027.
- "Nerfs à vif" -
"La situation est grave", a déclaré mercredi le chef du personnel de la marque VW, Arne Meiswinkel, qui dirige les négociations pour le groupe. L'environnement économique s'est "considérablement durci", a-t-il ajouté, justifiant une "restructuration complète".
Volkswagen a perdu du terrain auprès de la clientèle chinoise, qui a fait son succès depuis des décennies, mais privilégie désormais les marques nationales de voitures à batterie.
Les négociations se déroulent à Hanovre, capitale de la région de Basse-Saxe, où se situe le siège de Volkswagen. Dans les jardins de l'ancien château royal qui accueille les participants, les drapeaux rouges et les banderoles des syndicalistes offrent un contraste frappant.
Le Land de Basse-Saxe, actionnaire de Volkswagen, a appelé le groupe a trouver un terrain d'entente pour sortir de cette crise.
"Dans des situations comparables, Volkswagen a toujours réussi, malgré toutes les difficultés, à prendre les décisions nécessaires par consensus entre la direction et les salariés", a observé Stephan Weil, ministre-président du Land, où l'automobile représente 4,5% des emplois.
Il a contesté le chiffre de 30.000 emplois menacés, récemment avancé par la presse allemande, qui a mis les nerfs des ouvriers "à rude épreuve" selon lui.
La crise que traverse Volkswagen est symptomatique des défis auxquels est confrontée l'industrie automobile à l'échelle mondiale. Elle est aussi une épreuve pour l'Allemagne, en pleine stagnation économique, où Volkswagen est un acteur majeur.
N.Fournier--BTB