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Chez Emmaüs Défi, ils s'équipent neuf à petit prix, avant leur premier Noël chez eux
"Quand on n'a pas de meubles dans son logement, c'est galère", témoigne Fatou, qui a pu s'équiper neuf à petit prix à la Banque solidaire de l'équipement, un projet d'Emmaüs Défi visant à aider les personnes précaires à s'installer dans leur premier logement.
Cette mère célibataire de 32 ans, dont le prénom a été modifié, cherche aujourd'hui du linge de maison. "Je pense que les enfants vont aimer", sourit-elle en dépliant une housse de couette verte ornée d'animaux, vendue à cinq euros au sein de l'appartement témoin d'Emmaüs Défi, situé dans le XIXe arrondissement à Paris.
Petit bureau à 12 euros, fauteuil bleu à 25 euros, matelas une place à 30 euros: dans cet espace d'une trentaine de mètres carrés, une zone est consacrée à chaque pièce de la maison, exposant des meubles à commander et des accessoires à emporter directement.
Fatou choisit parmi la petite sélection disposée sur une étagère deux autres parures de lit, des rideaux et un plaid: "j'ai trouvé mon bonheur !", se réjouit cette francilienne qui se prépare à passer ses "premières fêtes de fin d'année" chez elle, un logement social attribué après une longue période où elle était hébergée avec ses enfants chez un proche.
Né il y a douze ans, le dispositif d'Emmaüs Défi vise à lutter contre la précarité matérielle des personnes qui accèdent à un logement pérenne. Sur demande de leur assistante sociale, elles viennent acquérir à prix cassés des objets neufs, donnés à l'association par une soixantaine d'entreprise partenaires.
- Dormir par terre -
Chaque bénéficiaire a droit à trois rendez-vous personnalisés d'une heure, lui permettant de sélectionner de l'équipement sur catalogue et dans l'appartement témoin.
"Tout part très vite" car "la plupart des gens n'ont rien quand ils arrivent dans leur logement", observe Adama Marina, 20 ans, l'une des conseillères vendeuses de l'antenne parisienne. "C'est dur quand quelqu'un n'a pas assez d'argent pour acheter ce qu'il veut alors qu'on voit dans son regard que l'objet lui plait".
Lors de son premier rendez-vous, Richard, 63 ans, a dû faire des choix pour respecter son budget de 200 euros. Ce Parisien, qui a connu la rue, vient de quitter un hôtel social pour un deux-pièces, mais "il n'y a rien dedans": "je dors par terre dans mon sac de couchage, avec mon sac à dos en guise d'oreiller et je me réveille d'inconfort. Alors l'idée, c'est d'acheter d'abord un lit".
Il devra chercher ailleurs pour trouver cadre et sommier, car seuls des matelas sont disponibles. Quasi neufs car hérités du village olympique des athlètes, à l'issue des Jeux de Paris.
Richard jette un oeil rapide au modèle d'exposition puis choisit quelques meubles essentiels pour lui. Plaque de cuisson, casseroles et vaisselle attendront. Tout comme son coup de coeur, un bureau permettant de travailler debout.
- Dignité -
Le dispositif présent à Paris, Aubervilliers, Lille, Lyon et Toulouse a déjà bénéficié à près de 37.000 personnes.
Pourquoi leur vendre ces objets donnés plutôt que leur offrir ? "Cela fait partie de notre modèle économique, même si le chiffre d'affaires est loin de couvrir nos dépenses", explique à l'AFP Alexandra Blanchin, directrice générale d'Emmaüs Défi, qui évoque des coûts de personnel et de point de vente.
"C'est important aussi pour la dignité de la personne qu'il y ait un prix sur l'objet", dit-elle.
Un principe généralement accepté des bénéficiaires, comme Awa (prénom d'emprunt), 40 ans. "Tout ne peut pas être gratuit", souligne cette mère de famille nombreuse, un chariot plein à craquer à ses côtés. Elle repart notamment avec deux lampes de bureau et une pile de serviettes de toilette multicolores. Les meubles seront livrés plus tard.
"C'est trop bien, j'ai pu prendre des commodes pour tous mes enfants au lieu d'une seule comme c'était 32 euros pièce seulement", sourit-elle, ravie de dépenser une partie de ce qu'elle et son mari ont "économisé pendant des années, en se privant de beaucoup de choses".
La famille a longtemps vécu dans deux chambres d'hôtel, un hébergement d'urgence. S'installer dans un appartement "c'est un grand changement, je n'arrive pas à y croire", ajoute-t-elle.
A.Gasser--BTB