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"Fermez le ciel!", exhortent les habitants de Kiev après de nouvelles frappes
Dans son appartement avec baies vitrées à Kiev, Alla Rahulina pleure en constatant les décombres d'une vie qui vient d'être brisée par de nouvelles frappes russes sur la capitale ukrainienne.
Une puissante explosion au petit matin mardi a entièrement soufflé les fenêtres et projeté contre le mur cette agente des impôts de 64 ans.
Sa mère, aveugle et invalide, se trouve à l'hôpital, énième victime des bombardements russes, que certains pensent préalables à un assaut sur Kiev.
"L'explosion a été énorme", raconte Alla Rahulina, en sanglots, la voix encore toute tremblante, après avoir été réconfortée par des voisins.
"Les gens dormaient et des morceaux de verre ont volé dans tous les sens. J'ai littéralement été projeté contre le mur: c'est vraiment un miracle que personne n'ait été tué", estime-t-elle.
Les forces russes, qui tentent d'encercler Kiev, ont intensifié ces derniers jours leurs frappes sur la capitale, qui a pour le moment évité le sort réservé à Marioupol et Kharkiv, en état de siège.
Malgré cela, Kiev se prépare à un siège. La moitié des plus de trois millions d'habitants ont déjà fui la ville.
Mardi matin, la capitale a été bombardée à quatre reprises par les forces russes, touchant des immeubles et une station de métro. Bilan, quatre morts. En conséquence, un couvre-feu est imposé à partir de mardi soir pour 35 heures.
- "Je ne peux pas quitter le pays" -
Un énorme cratère s'est formé au niveau de l'immeuble d'Alla dans le quartier de Podil, dans le nord-est de Kiev. Des experts de la police scientifique s'activent pour examiner les restes des missiles.
A l'intérieur de cet immeuble de dix étages typique des années soviétiques, la vie semble s'être arrêtée. Certains appartements sont entièrement carbonisés, d'autres remplis de bouts de verre et de débris en tous genres.
Des habitants ont déjà dégagé ce qu'ils pouvaient, tandis que certains sont tellement sous le choc qu'aucun mot ne sort de leur bouche.
L'appartement voisin de celui d'Alla a été dévasté par les flammes, et de l'eau monte jusqu'aux chevilles suite à l'intervention des pompiers pour éteindre le feu.
Ses propriétaires sont là, assis à côté d'une fenêtre qui n'en est plus vraiment une, cigarettes à la main et regards dans le vide. Un petit chien noir patauge dans l'eau.
"Je me suis réveillé, j'avais un mauvais pressentiment. Je voulais me lever, mais le souffle m'a propulsé hors du lit. Je suis tombé et me suis ouvert le pied", raconte un homme qui n'a pas voulu donner son identité.
Kiev est devenue depuis plusieurs jours une ville-fantôme, ses rues désertées ont pour seuls éléments visibles des checkpoints. Malgré la peur palpable d'une offensive russe, certains n'ont pas d'autre choix que de rester.
"Je ne peux pas quitter le pays, car mon fils aîné a 20 ans et sert dans l'armée", explique Olena Iavdochtchouk, 40 ans, directrice d'une clinique.
"Donc je reste ici avec mon mari et mes deux enfants qui sont plus jeunes", ajoute-t-elle, balayant des morceaux de verre qui jonchent le sol à côté d'une aire de jeux.
- "Vous serez les prochains !" -
Au moment où la pression russe se fait plus forte sur Kiev et où le nombre de victimes de la guerre augmente, beaucoup d'habitants de la capitale ukrainienne ne comprennent pas pourquoi les Occidentaux n'interviennent pas militairement.
Ils font écho aux multiples appels désespérés du président Volodymyr Zelensky pour que l'Otan impose une zone d'exclusion aérienne dans le ciel ukrainien, une demande constamment rejetée par Washington et les Européens qui redoutent d'être entraînés dans une guerre avec la Russie.
"Dieu merci, nous sommes toujours en vie. Regardez ça!", s'exclame Natalia, 60 ans, employée de la station de métro voisine affairée à nettoyer son balcon.
Des débris de verre tombent des étages au-dessus d'elle. Elle montre les dégâts dans son appartement avec de grands gestes de rage impuissante, pendant que des larmes coulent sur ses joues.
"Donnez-nous des avions, fermez le ciel ! Kiev va être rasé, et où ira Vladimir Poutine ensuite ?", s'insurge-t-elle. "Il ne s'arrêtera pas, c'est un fou. Vous serez les prochains !"
I.Meyer--BTB