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Mozambique: peur et chaos à Maputo, où la pénurie s'installe
Un climat de peur s'est installé à Maputo, la capitale du Mozambique qui subit depuis plusieurs jours barricades, pillages et vandalisme, après la confirmation contestée de la victoire du parti au pouvoir aux élections d'octobre. Ses habitants commencent à manquer de tout: nourriture, essence et médicaments.
L'évasion spectaculaire de plus d'un millier de détenus d'une prison de sécurité maximale mercredi alimente aussi de folles rumeurs. Beaucoup ont ainsi été réveillés en pleine nuit par des voisins ou du bruit dans la rue, et des patrouilles de quartier se sont mises en place.
"Mon voisin m'a réveillée, me disant que des hommes armés de machettes circulaient", raconte à l'AFP Maria Amelia, femme de ménage de 55 ans, qui vit à Matola, la grande ville voisine de Maputo.
"En sortant, j'ai vu mes voisins, armés de couteaux pour se défendre contre ces envahisseurs. Mais je n'ai vu personne. J'étais terrifiée".
Armand Tembe, 40 ans, qui travaille dans une banque à Maputo, a aussi été sorti de son lit avant l'aube. "Je n'ai pas vu de criminels dehors. Mais ça commence à être affolant. Je ne sais pas où va le pays", commente-t-il dépité.
"On a veillé jusqu'à 4h30 du matin et patrouillé pour quelque chose dont nous avons seulement entendu parler et que personne n'a vu", confie encore une femme qui veut rester anonyme. "Ce n'étaient que des ouï-dire, ça donne l'impression d'un plan macabre".
Jusqu'à présent, "aucun rapport vérifié n'a fait état d'attaques de ce genre", résume auprès de l'AFP le chercheur mozambicain Borges Nhamirre, basé à Pretoria.
Mais le fait que le chef de la police, mercredi soir devant la presse, "ait annoncé que les détenus pourraient +visiter+ des maisons a alimenté l'inquiétude", souligne-t-il.
"Le sentiment qui prévaut dans les conversations suggère que le gouvernement pourrait avoir inventé cette crise pour contrôler l'agitation sociale en cours", ajoute-t-il encore.
- "Manipulation" -
Dans les rues de Maputo, des barricades sont lentement démantelées. L'armée nettoie certains axes, a constaté l'AFP. Et les gens sortent timidement de chez eux pour chercher des produits de première nécessité.
"Je cherche du pain", explique Isabel Rocha, 29 ans, en capulana traditionnelle. "Les boulangeries sont fermées depuis quatre jours. En fait on manque de tout. Mêmes les petites épiceries sont fermées", confie-t-elle à l'AFP dans le quartier de Laulane, après une nuit blanche en raison des rumeurs sur l'insécurité.
Lina Chauque 47 ans est assise sur le trottoir, un grand baluchon contenant des salades et des choux à côté d'elle. Avec plusieurs autres femmes découragées, elle attend depuis deux heures un bus qui ne vient pas, pour aller vendre ses produits au marché.
"Nous avons essayé de demander de l'aide à quelques camions qui sont passés, mais les chauffeurs n'ont pas voulu nous prendre".
Un peu plus loin, des voitures font la queue patiemment devant une station-essence. Une seule pompe fonctionne encore, le ravitaillement reste compliqué par la circulation entravée.
"Je cherche des médicaments pour moi et pour ma mère", explique Tomas Panguene, 65 ans, qui souffre de douleurs au genou. "Hier je suis sorti pour trouver une pharmacie mais les rues étaient encore barricadées. J'ai trouvé ce qu'il me fallait ce matin".
Le principal opposant, Venancio Mondlane, continue à dénoncer des résultats truqués, au sujet du scrutin du 9 octobre.
La confirmation lundi par la plus haute cour du pays d'une large victoire du Frelimo, au pouvoir depuis un demi-siècle, avait mis le feu aux poudres, déclenchant des émeutes urbaines qui ont fait plus de 125 morts en quelques jours, selon l'ONG locale Plataforma Decide.
"Nous savons qui sont les vrais bandits, c'est le Frelimo", a-t-il asséné vendredi sur les réseaux sociaux, estimant que les patrouilles de sécurité sont une "manipulation" pour "distraire" l'attention de la contestation politique.
strs-ger/cm
M.Furrer--BTB