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A Vienne, extrême droite et conservateurs à couteaux tirés
L'extrême droite, pour la première fois aux portes de la chancellerie, et la droite sont au bord de la rupture mercredi en Autriche, aucune des deux formations politiques ne voulant céder aux exigences de l'autre.
Après des rumeurs et des fuites dans la presse, les divergences ont éclaté au grand jour, à coup de communiqués de presse vindicatifs, visant à faire porter à l'autre le chapeau du possible échec des pourparlers.
Fin de la taxe carbone, "asile zéro", attaque des ONG, des médias ou des LGBT+... le Parti autrichien de la Liberté (FPÖ) n'a pas reculé d'un pouce sur sa volonté de renverser la table, faisant fi d'un système parlementaire basé sur le compromis.
Un projet trumpien qui inquiète la société civile quant au maintien de l'Etat de droit, si le très radical Herbert Kickl installait son parti à la chancellerie.
La perspective inédite d'une chancellerie aux mains du FPÖ, arrivé pour la première fois en tête avec près de 29% des voix aux législatives fin septembre, grâce au soutien des conservateurs de l'ÖVP (26,3%), s'était esquissée début janvier, après l'échec de précédentes discussions.
- Blocage sur la Russie -
Après le coup de tonnerre du scrutin, la droite avait tenté de former une coalition "tout sauf Kickl" avec la gauche et les libéraux. Sans réussir à trouver un compromis.
L'ÖVP affaiblie avait alors tendu la main à son ennemi, s'asseyant sur une promesse de campagne. Mais les tensions ont rapidement affleuré, Herbert Kickl brusquant cette formation, habituée au pouvoir depuis 1987.
Le FPÖ tient à avoir la main haute sur l'Intérieur, or les conservateurs, qui leur avaient cédé ce portefeuille fin 2017, sont échaudés par l'expérience: les services de renseignement occidentaux avaient pris leurs distances en raison des liens du parti d'extrême droite avec la Russie.
Ce qui pose de graves "risques pour la sécurité" de l'Autriche, incapable seule de déjouer les projets d'attentats, avertit l'ÖVP, soucieuse de "préserver la collaboration" avec leurs partenaires.
Elle a donc proposé de confier à Herbert Kickl uniquement les domaines de l'asile et de la migration. Une répartition des tâches "vouée à l'échec", a réagi le FPÖ.
Autre problème de taille: la droite réclame un positionnement clair de la coalition contre la Russie, selon un document confidentiel révélé par les médias.
"Le FPÖ n'a fait aucun compromis", résume le politologue Thomas Hofer. "Je crois que cela ressemble un peu à la façon dont le président américain Donald Trump s'y prend, dans le sens où il veut vraiment tenir ses promesses électorales une par une".
"Or bien sûr, le paquet que Kickl a mis sur la table est inacceptable pour l'ÖVP", selon lui.
- Ligne dure -
La droite a déjà gouverné deux fois avec le FPÖ en Autriche. Mais c'était elle qui occupait alors la chancellerie et représentait le pays à Bruxelles, imposant un ordre du jour pro-européen.
Herbert Kickl opte, lui, depuis le début des négociations pour une ligne dure. Afin de construire son "Autriche forteresse", il réclame un retour à la stricte neutralité et la fin de la primauté du droit européen.
Depuis le début des pourparlers, des dizaines de milliers de manifestants se sont rassemblés à plusieurs reprises à Vienne pour défendre les droits fondamentaux.
Si les négociations échouent, le politologue Johannes Huber s'attend à de "nouvelles élections au printemps ou à l'automne", pour lesquelles le FPÖ est désormais crédité de 35% des intentions de vote.
L'ÖVP a chuté à environ 18% et se trouve maintenant en troisième position, derrière les sociaux-démocrates, dans les sondages d'opinion.
La gauche et les libéraux lui ont toutefois proposé mardi de renouer le dialogue afin d'éviter que les plus longues négociations jamais observées en Autriche depuis l'après-guerre ne débouchent que sur de l'instabilité.
Les inquiétudes grandissent sur les conséquences du blocage actuel pour l'économie, ce pays prospère de 9,2 millions d'habitants en mauvaise passe économique n'ayant toujours pas voté de budget pour 2025.
M.Odermatt--BTB