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Ukraine: le sort du Donbass repose sur la ville de Severodonetsk, selon Zelensky
Les soldats ukrainiens livrent à Severodonetsk l'une des "batailles les plus difficiles" depuis le début de la guerre pour résister aux forces russes qui contrôlent désormais une grande partie de cette ville stratégique de l'Est où, selon le président Volodymyr Zelensky, se joue "le sort" de la région du Donbass.
"Nous défendons nos positions, en infligeant des pertes importantes à l'ennemi. C'est une bataille très dure, très difficile, probablement une des plus difficiles de cette guerre", a affirmé le président ukrainien dans une vidéo diffusée mercredi soir.
Pour la Russie, mettre la main sur cette ville serait déterminant en vue d'une conquête de l'intégralité du vaste bassin houiller du Donbass, déjà en partie tenu par des séparatistes prorusses depuis 2014.
"A bien des égards, le sort de notre Donbass se décide là", a estimé M. Zelensky.
La semaine dernière, Severodonetsk semblait sur le point de tomber aux mains de l'armé russe mais les troupes ukrainiennes ont contre-attaqué et réussi à tenir bon, en dépit de leur infériorité numérique. Les forces russes regagnent cependant du terrain.
Quelque 800 civils sont pris au piège dans l'usine chimique Azot de la ville, où ils se sont réfugiés, selon l'avocat d'un magnat ukrainien dont la société est propriétaire de l'installation.
Les autorités ukrainiennes n'ont pas confirmé cette information.
Le situation est plus compliquée dans d'autres parties du Donbass.
La ville voisine de Lyssytchansk est entièrement contrôlée par l'armée ukrainienne mais subit des bombardements "puissants", a indiqué Serguiï Gaïdaï, gouverneur de la région de Lougansk, accusant les forces russes de viser "délibérément" les hôpitaux et les centres de distribution d'aide humanitaire.
Dans la ville de Bakhmut, un établissement scolaire a été entièrement détruit mercredi par un bombardement, des livres brûlés étant visibles parmi les décombres, selon des journalistes de l'AFP. Aucun blessé ou mort n'a été signalé.
Les forces de Moscou n'ont progressé que lentement jusqu'ici, faisant dire aux analystes occidentaux que l'invasion russe lancée le 24 février avait tourné à la guerre d'usure, avec des avancées limitées obtenues au prix de destructions massives et de lourdes pertes.
- "Personne pour m'aider" -
Si beaucoup de civils ont évacué Severodonetsk et Lyssytchansk, plusieurs milliers y sont néanmoins restés --des personnes âgées, les gens s'occupant d'elles ou ceux n'ayant pas les moyens de partir ailleurs.
Ivan Sossnine, 19 ans, est resté pour s'occuper de sa grand-mère infirme.
"Ici c'est chez nous. On ne connait pas autre chose, on a grandi ici. Où irions-nous? Et nous n'avons pas assez d'argent pour séjourner longtemps ailleurs", explique le jeune homme au milieu des décombres de sa maison en grande partie détruite.
"Tous les jours, il y a des bombardements, tous les jours quelque chose brûle", témoigne Iouri Krassnikov, assis dans un quartier de Lyssytchansk aux nombreux immeubles endommagés et pavillons calcinés, alors que l'artillerie gronde non loin de là.
"Il n'y a personne pour m'aider", se lamente ce retraité qui se sent abandonné.
Face à la pression des troupes de Moscou, les Ukrainiens répètent avoir urgemment besoin d'armes plus puissantes.
La livraison de systèmes de lance-roquettes multiples, d'une portée de quelque 80 km, soit légèrement supérieure aux systèmes russes, a été annoncée par Washington et par Londres, mais on ignore quand les Ukrainiens pourront commencer à les utiliser.
Ils se sont jusqu'ici contentés d'armes occidentales de moindre portée.
- "Vague de faim" -
Plus de 100 jours après l'offensive russe, les conséquences de la guerre continuent de s'aggraver dans le monde, tant sur le plan financier et alimentaire qu'énergétique, touchant 1,6 milliard de personnes, a alerté mercredi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.
"L'impact de la guerre sur la sécurité alimentaire, l'énergie et les finances est systémique, grave et s'accélère".
"Pour les populations du monde entier, la guerre menace de déclencher une vague sans précédent de faim et de misère, laissant dans son sillage le chaos social et économique", a averti M. Guterres
"Il n'y a qu'un seul moyen d'arrêter cette tempête qui se prépare: l'invasion russe de l'Ukraine doit cesser".
Le blocage des ports ukrainiens par la flotte russe de la mer Noire --à commencer par celui d'Odessa, principal port du pays-- paralyse ses exportations de céréales, notamment de blé, dont elle était avant la guerre en passe de devenir le troisième exportateur mondial.
Des pays africains et moyen-orientaux sont les premiers touchés et craignent de graves crises alimentaires.
Quelque 20 à 25 millions de tonnes sont actuellement bloquées, des quantités qui pourraient tripler d'"ici l'automne" pour atteindre 75 millions de tonnes, selon le président ukrainien.
Alors que Moscou accuse les Occidentaux d'être à l'origine de cette pénurie en raison de leurs sanctions, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a rencontré mercredi son homologue turc Mevlut Cavusoglu à Ankara pour discuter de "corridors maritimes sécurisés" qui permettraient de reprendre les transports de céréales en mer Noire.
- Inflation vertigineuse -
A la demande de l'ONU, la Turquie a proposé son aide pour escorter les convois maritimes depuis les ports ukrainiens, malgré la présence de mines.
Lors d'une conférence de presse, M. Lavrov a assuré que la Russie était "prête à garantir la sécurité des navires qui quittent les ports ukrainiens (...) en coopération avec nos collègues turcs".
Pour M. Cavusoglu, la demande de Moscou de lever les sanctions qui frappent indirectement ses exportations agricoles, pour faciliter les exportations ukrainiennes, était "légitime".
Il a cité spécifiquement les exportations "de céréales et d'engrais" russes, qui ne sont pas directement visées par les sanctions occidentales mais qui sont de fait empêchées par la suspension des échanges bancaires et financiers.
La hausse des prix touche aussi de plein fouet la Russie, où l'inflation a connu une hausse vertigineuse jusqu'à battre un record de vingt ans. Elle a cependant commencé à reculer en mai, atteignant tout de même 17,1% sur un an, selon des données officielles.
De leur côté, les sanctions imposées à Moscou sont en train d'anéantir une quinzaine d'années de progrès économique de la Russie et trois décennies d'intégration avec l'Occident, selon un rapport de l'Institut de la Finance internationale (IFF) publié mercredi.
L'IIF prévoit une contraction de l'économie russe de 15% cette année et de 3% supplémentaires en 2023.
La guerre a poussé quelque 6,5 millions d'Ukrainiens à fuir leur pays et fait des milliers de morts: au moins 4.200 civils, selon le dernier bilan de l'ONU, qui estime les chiffres réels "considérablement plus élevés", et des milliers de militaires, même si les belligérants communiquent rarement sur leurs pertes.
C.Meier--BTB