Berliner Tageblatt - Elisabeth Borne, Première ministre en sursis

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Elisabeth Borne, Première ministre en sursis
Elisabeth Borne, Première ministre en sursis / Photo: © AFP

Elisabeth Borne, Première ministre en sursis

Nommée il y a à peine plus d'un mois à Matignon, Elisabeth Borne est déjà fragilisée par l'issue des élections législatives qui modifie la donne politique. Et même si Emmanuel Macron a refusé mardi sa démission, son sort reste incertain.

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POURQUOI MME BORNE EST EN DANGER ?

Avec seulement 245 députés élus dimanche, l'exécutif a perdu la majorité absolue à l'Assemblée et se voit contraint de chercher de nouveaux alliés pour voter les réformes promises par Emmanuel Macron. Les équilibres politiques nés de la présidentielle sont donc bouleversés et le chef de l'Etat doit en tenir en compte: c'est en partie le sens des consultations avec l'ensemble des forces politiques lancées mardi.

Plusieurs options s'offriront ensuite au président, allant de simples ajustements de son gouvernement pour donner des gages à la gauche ou à la droite, à un grand chamboule-tout qui l'amènerait à en changer la tête.

A ce contexte s'ajoute le profil de Mme Borne, qui comme Jean Castex, est considérée comme plus technicienne que politique. Elle a toutefois à son actif son expérience de ministre de la Transition écologique ou de l'Emploi. Et les défis s'accumulent face à un hémicycle qui s'annonce incandescent et la nécessité de trouver des compromis avec les oppositions et partenaires sociaux sur les textes les plus bouillants, à commencer par la réforme des retraites. "C'est elle qui a fait le plus de textes lors du dernier quinquennat. A 61 ans, elle en a vu d'autres", répond son entourage.

SOUS LES FEUX DES OPPOSITIONS

Fusible principal de tout président en difficulté, le Premier ministre est une cible naturelle pour les oppositions après ces élections ratées.

"Cette femme n'a aucune légitimité", a assuré mardi le chef de file des Insoumis Jean-Luc Mélenchon.

L'ancienne candidate de LR à la présidentielle Valérie Pécresse a également appelé lundi Emmanuel Macron à "changer de Premier ministre et de gouvernement", à l'unisson d'un vice-président du parti Gilles Platret, pour qui "elle n'a pas le profil politique nécessaire".

De son côté, la chef de file du RN Marine Le Pen a estimé que "changer Elisabeth Borne pour mettre quelqu'un d'autre? C'est pas ça qui change quelque chose". Le président par intérim du RN Jordan Bardella juge lui qu'elle doit "rendre son tablier".

UN TEMPS SUSPENDU

Les prochains jours seront donc cruciaux pour Mme Borne. Sa démission remise mardi - comme il est d'usage après des élections législatives, quels qu'en soient les résultats - a été pour l'heure refusée, "afin que le gouvernement reste à la tâche". Mais un remaniement est en vue pour au moins remplacer trois ministres battues.

Elle reste pour l'heure à la manoeuvre alors que le président va être happé par des obligations internationales.

Mardi, elle a ainsi réuni tout son gouvernement en début d'après-midi à Matignon, et recevra la semaine prochaine "les présidents de groupes fraîchement élus à l'Assemblée nationale".

Mais un jalon important se profile à l'horizon: la traditionnelle déclaration de politique générale que Mme Borne devrait prononcer devant l'Assemblée le 5 juillet.

Ce discours, qui n'est pas obligatoire mais reste une étape incontournable, est le plus souvent suivi d'un vote de confiance qui engage la responsabilité de l'exécutif. Si des prédécesseurs de Mme Borne avaient choisi de ne pas s'exposer à un scrutin de l'Assemblée (Rocard, Cresson, Bérégovoy), la manoeuvre serait aussi un aveu de faiblesse. Et de toute façon, LFI a déjà promis de déposer un motion de censure.

POURQUOI POURRAIT-ELLE RESTER TOUT DE MEME ?

Des arguments plaident aussi pour le maintien de Mme Borne, au premier rang desquels sa fine connaissance de la machine gouvernementale après avoir occupé plusieurs ministères dans le gouvernement précédent (Transports, Ecologie, Travail).

Elue d'un cheveu dimanche dans le Calvados, elle a aussi réussi son atterrissage politique.

Première femme à Matignon depuis Edith Cresson en 1991, son éviction prématurée enverrait aussi un message négatif... à moins de la remplacer par une autre femme.

Mais le casting de M. Macron, qui avait notamment failli nommer l'ex-ministre de droite Catherine Vautrin, avait buté sur le vivier à sa disposition. A ce titre, "il est difficile pour Macron de remplacer Borne sans se déjuger", note un conseiller ministériel.

F.Pavlenko--BTB